Article relu par l’association RevelNac (Association de vétérinaires spécialisés en NAC) : http://www.revelnac.fr/
La dentition du lapin
Le lapin possède 28 dents hypsodontes c’est-à-dire à croissance continue : molaires, prémolaires comme incisives. Le lapin ne possède pas de canines au contraire du chien, du chat ou de l’homme. Ses dents de lait tombent peu de temps avant ou après la naissance et sont remplacées par les dents définitives.
Les incisives servent à couper les végétaux (alimentation et entretien des lieux de vie). Elles sont au nombre de 6. Une paire inférieure, une paire supérieure et deux incisives vestigiales, situées juste en arrière des incisives supérieures où viennent se caler les incisives inférieures. Le rôle initial des incisives vestigiales n’est pas correctement établi. Les incisives supérieures poussent d’environ 2 mm par semaine et les incisives inférieures de 2,4 mm par semaine.
Incisives normales, de face
Incisives normales, de profil
Les dents jugales (ou cheek teeth = prémolaires + molaires) servent à broyer les végétaux. Elles sont séparées des incisives par un important diastème (espace sans dents, du fait de l’absence de canines). Il y a 6 prémolaires + 6 molaires sur le maxillaire (mâchoire supérieure) et de 6 prémolaires + 4 molaires sur la mandibule (mâchoire inférieure).
Occlusion normale
C’est la mastication des aliments naturels par le lapin qui permet une usure dentaire correcte de ses dents à pousse continue. Lorsque qu’il mastique du foin, de l’herbe, des feuillages, des branches ou des légumes verts, il fait un mouvement rostro-caudal et latéro-latéral en forme de 8 complexe qui broie les aliments et use les dents les unes contre les autres. Ces mouvements de mastication sont longs et appuyés : le broyage des fibres contenues dans les végétaux est difficile mais c’est bien cela qui contribue à une bonne physiologie dentaire (muscles masticateurs adaptés, usure continue des dents). A l’inverse, lorsque le lapin mange des granulés, le mouvement des mâchoires est plus vertical des mâchoires pour écraser les granulés. De plus, la salivation délite les granulés qui sont ainsi rapidement déglutis, après une très courte mastication. Ce mouvement faussé crée en de mauvaises habitudes de mastication et est à l’origine de nombreuses affections dentaires.
Vous pouvez voir des vidéos illustrant l’anatomie et les mouvements dentaires à la fin de l’article sur ce site : http://cliniquedesdunes.blogspot.fr/2013/08/les-soins-dentaires-du-lapin.html
Détecter les troubles dentaires
Les signes suivants peuvent montrer un trouble dentaire :
Anorexie ou diminution de l’appétit ;
Changement des habitudes alimentaires (le lapin délaisse le foin qu’il affectionnait mais continue à manger ses légumes, il ne mange sa verdure que flétrie ou uniquement certaines parties, coupe ses granulés en morceaux mais les mange peu, etc.). Une obésité peut en découler si le lapin ne mange plus que ses granulés (prise de poids par excès d’ingestion d’aliments très caloriques) ;
Ptyalisme (salivation excessive) ou mauvaise haleine ;
Crottes molles, diarrhée, diminution du nombre ou de la taille des crottes, caecotrophes non ingérés
Eternuements, jetage (mouchage), détresse respiratoire
Troubles oculaires : exophtalmie (œil exorbité), épiphora (larmoiement excessif), conjonctivite et dacryocystite (inflammation d’un sac lacrymal)
Mouvements de mastication dans le vide, bruxisme (grincements de dents) dû à la douleur.
Ptyalisme (salivation excessive) chez Paprika
Les affections dentaires
Leurs causes sont diverses :
d’origine traumatique : fracture d’une dent ou de la mâchoire après un choc ou une chute, fracture des incisives en mordant les barreaux de cage, fracture d’une prémolaire lors de l’ingestion d’un aliment dur (grains de maïs séché) etc.
d’origine congénitale : par défaut de positionnement des dents ou position anormale des mâchoires. Le prognathisme mandibulaire (mâchoire inférieure trop longue) ainsi que le brachygnathisme maxillaire (mâchoire supérieure trop longue) sont des affections dentaires pouvant avoir une origine héréditaire : elles se rencontrent beaucoup chez les races naines et béliers. Elles occasionnent un défaut de positionnement et donc de croissance des incisives. Si cette malocclusion n’est pas corrigée (extraction chirurgicale des incisives), une malocclusion secondaire des dents jugales se développe.
Malocclusion et pousse anarchique des incisives et des jugales
d’origine nutritionnelle :
- par carence ou excès d’apports de certains minéraux. Une carence en calcium entraîne la constitution d’une dent fragilisée plus sensible aux traumatismes et présentant une croissance anormale à l’origine de malocclusions acquises.
- par distribution d’un aliment ne permettant pas une usure dentaire suffisante : c’est le cas lorsque le lapin mange essentiellement des granulés ou extrudés qui ne permettent pas une bonne usure dentaire. En effet, les granulés ne sont pas abrasifs et sont mastiqués verticalement avec une forte pression alors que le mouvement normal de mastication, permettant une bonne usure dentaire est latéral formant un 8 complexe. Les granulés sont également vite mastiqués et avalés contrairement du foin ou de la verdure qui doivent être mastiqués longuement avant d’être ingérés et ont ainsi le temps d’user les dents.
d’origine métabolique : Le défaut d’exposition aux rayons UVB est une cause désormais bien établie de troubles dentaires. Il est conseillé de permettre aux lapins vaccinés un libre accès à l’extérieur sous surveillance et à l’abri des prédateurs et de la chaleur excessive durant les beaux jours. Si un accès à l’extérieur n’est pas possible, l’exposition à une lampe UVB est sans doute bénéfique.
anorexie : lors d’un évènement empêchant le lapin de s’alimenter, les dents ne s’usent pas car le lapin ne mastique pas. Des lapins gavés à long terme pour des raisons variées nécessitent une surveillance dentaire régulière.
Les troubles dentaires peuvent toucher les incisives ou les dents jugales :
Les malocclusions incisives : les incisives n’étant pas correctement en contact, elles ne s’usent pas et vont continuer de pousser librement. Les incisives supérieures se recourbent généralement à l’intérieur de la bouche, tandis que les incisives inférieures poussent vers l’extérieur, ceci pouvant aller jusqu’à blesser et empêcher totalement le lapin de s’alimenter et de consommer ses caecotrophes. Les incisives ne doivent pas être coupées à la pince coupante, au risque de créer des infections en fissurant la dent voire de la fracturer. De plus, cet acte est douloureux pour le lapin ! Les incisives doivent être coupées avec des instruments spécifiques en ayant recours à une anesthésie flash (anesthésie de courte durée). Lorsque la coupe des incisives doit être renouvelée très régulièrement, leur extraction est recommandée, seule méthode prévenant véritablement les complications à long terme et restaurant une physiologie dentaire adéquate. Cela limite le stress lié aux actes répétés pour le lapin, le risque de complications lié à des coupes et anesthésies répétées. De plus, c’est une mesure qui est finalement bien moins coûteuse à long terme.
Malocclusion des incisives supérieures et inférieures
Les malocclusions jugales : les molaires ou prémolaires ne s’affrontant pas correctement, elles s’usent anormalement et poussent en formant des pointes dentaires (spicules) blessant la langue ou les joues. Les dents supérieures forment généralement des pointes vers les joues tandis que les dents inférieures forment des pointes vers la langue. Les dents deviennent plus mobiles et se fragilisent. Un abcès dentaire secondaire risque de survenir à long terme.
Pointe sur dent jugale supérieure droite blessant la joue
Les dents usées de manière inappropriée lors de malocclusions peuvent devenir trop longues : les racines dentaires peuvent alors déformer, voire percer l’os des maxillaires ou des mandibules, ces lésions pouvant déboucher sur des abcès dentaires.
Racines dentaires déformant la mandibule
Eviter les troubles dentaires :
Le meilleur moyen d’assurer à votre lapin une bonne santé générale et une bonne dentition est de lui fournir une qualité de vie et une alimentation la plus proche possible de celle du lapin sauvage, c’est-à-dire :
Du foin de qualité, vert et odorant, non poussiéreux, séché au soleil pour une bonne teneur en vitamine D, laissé à disposition en permanence. Le lapin aimant trier et gaspillant beaucoup, il est conseillé de lui distribuer du foin frais, 2 à 3 fois par jour afin qu’il reste appétant. Le foin est l’aliment de prédilection du lapin, il en mange l’équivalent de son propre volume chaque jour. Il lui permet de s’occuper tout au long de la journée, il est bien plus long de se rassasier avec du foin qu’avec des granulés. ll contribue à la fois à une bonne usure dentaire grâce à cette mastication en forme de 8 complexe et à un bon transit du fait de l’apport important en fibres. Le lapin apprécie de manger son foin à même le sol de sa litière, il peut ainsi faire ses besoins tout en mangeant (cela l’incite également à la propreté).
De la verdure (légumes verts et herbe) matin et soir
Limiter les granulés à un court moment de la journée, voire les supprimer en parallèle d’un apport équilibré en verdure, pour l’inciter à manger du foin le reste du temps.
Lui permettre un accès régulier à l’extérieur, le jardin étant l’idéal mais si cela n’est pas possible à un balcon ou tout du moins en ouvrant les fenêtres dès que le temps s’y prête, pour lui offrir une exposition au soleil et lui permettre ainsi de synthétiser la vitamine D nécessaire à la fixation du calcium au niveau osseux et dentaire.
LIENS :
Site Medirabbit – Maladies dentaires : http://www.medirabbit.com/FR/Maladi…
Médecine et chirurgie du lapin de compagnie de Didier Boussarie et Franck Rival
ATLAS de Dentisterie du lapin de Compagnie de Didier Boussarie et Franck Rival
Textbook of rabbit medicine de Frances Harcourt-Brown
Soins du lapin de compagnie, bien être et maladies de Jean-François Quinton
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